Le cercle des poursuites engagées contre les "élus de la nation" s'élargit davantage au fil des enquêtes. En plus de onze conseillers, trois députés au moins sont entendus par les juges d'instruction. Tout ce beau monde sera absent, ce vendredi, au Parlement.
Le cercle des "élus de la nation", faisant l'objet de procédures judiciaires, en relation avec le scrutin partiel du 8 septembre, s'élargit davantage au fil des enquêtes et auditions menées par la justice. Des sources judiciaires, mais partisanes également, affirment que trois députés au moins sont actuellement entendus par les juges d'instruction près des cours d'appel de trois villes pour leurs rôles présumés dans les fraudes ayant émaillé l'élection de conseillers dans les mêmes régions. Selon ces sources, il s'agit de trois députés istiqlaliens dont Abdellah El Ouariti.
Celui-ci, chef de cabinet de Abbas El Fassi au moment où ce dernier était chargé du portefeuille de l'Emploi, serait intervenu, en tant qu'intermédiaire, pour "faciliter" l'élection du PPS Mohamed Talmoust (ex-député MDS et maire actuel de Kénitra). D'ailleurs, dès la publication des résultats du scrutin du 8 septembre, la hiérarchie du Parti de l'Istiqlal avait décidé une commission d'enquête pour faire la lumière sur le fiasco (aucun des quatre sièges) du parti dans la région du Gharb-Chrarda-Beni Hssen, où il dispose d'une solide base de grands électeurs et notamment au sein du collège des collectivités locales. Un autre député istiqlalien, Mohamed Karime, a été convoqué par les juges pour élucider son rôle présumé dans l'élection du RNI Omar Mohib à Safi. Enfin, Mohamed Bernichi, autre député istiqlalien de Taza aurait également été convoqué par la justice.
Il serait intervenu pour "arranger" l'élection de Abdelouahed Messaoudi, conseiller PI élu lors du dernier scrutin pour le renouvellement de la deuxième Chambre.Au total, c'est le parti de Abbas El Fassi qui arrive en tête quant au nombre des élus faisant l'objet de procédures judiciaires avec trois députés et trois conseillers (Abdelouahed Messaoudi, Abdellah Mekkaoui et Mohamed Saoud) sur les 17 élus récemment.A rappeler que 11 conseillers au moins, et au total, font l'objet de procédures judiciaires depuis plusieurs semaines. Le PPS bat le record avec des poursuites engagées contre deux des quatre conseillers élus le 8 septembre dernier (Mohamed Talmoust et Ahmed Tahiri). Mais on retrouve aussi le MP avec plusieurs conseillers présumés véreux (Abdelaziz Chraïbi, Mohamed Kouskouss et Mohamed Mohaddib), les RNI Omar Mouhib et Mohamed Jebha, mais aussi l'USFP Mohamed Ben Messaoud, élu dans la région de Marrakech-Tensift-El Haouz.Saïd Lebbar (ex-MP et candidat FFD malheureux dans la région de Fès-Boulemane) complète cette liste, alors que d'autres conseillers et députés pourraient être entendus dans les jours à venir.Les partis politiques concernés, de la majorité gouvernementale exclusivement, n'ont pas réagi de manière officielle à ces poursuites. Aucune mesure organisationnelle n'a non plus été prise à l'encontre des élus poursuivis.
Le week-end dernier, à l'issue d'une recontre entre leurs hiérarchies respectives, le PPS et l'Istiqlal se sont déclarés pour la moralisation de la vie politique nationale, mais avaient condamné le "caractère sélectif" des poursuites actuellement engagées. Visaient-ils Mohamed Bouzoubaâ, Chakib Benmoussa ou les deux ? En plus des députés et des conseillers, des dizaines de "grands électeurs" (de différents collèges électoraux) sont entendus par les juges d'instruction des cours d'appel du Royaume. Toutes ces procédures avaient été engagées par les juridictions compétentes sur la base des rapports de l'autorité locale et des services de la police judiciaire.
Les concernés, selon des sources judiciaires, avaient fait l'objet d'écoutes téléphoniques quelques jours avant le 8 septembre et plusieurs d'entre eux n'auraient eu rien à "contester" quand ils ont été confrontés à leurs "propres marchandages", par leurs propres voix et via leurs propres téléphones portables. Ces derniers ont-ils le droit d'assister, ce vendredi, à l'ouverture de la session d'automne du Parlement ? Légalement, rien ne l'interdit puisqu'ils n'ont pas encore été condamnés et que leur élection n'a pas été invalidée par le Conseil constitutionnel. Leur présence, face à la plus haute autorité du pays, est éthiquement incorrecte.De sources judiciaires, on apprend que ces derniers ne pourront pas être de la partie, ce vendredi dans l'après-midi. Soumis aux dispositions du contrôle judiciaire, ils sont dans l'obligation de "faire acte de présence" chez la police judiciaire chaque mardi et chaque vendredi et de ne pas quitter leurs villes de résidence.
La deuxième Chambre, avec ce précédent dans l'histoire du Maroc, se retrouve de nouveau au centre de tous les débats après avoir été au centre de toutes les "convoitises".