La population du Vieux Continent stagne, voire régresse. Une transformation non sans conséquences socio-économiques.
L’Europe ne déroge pas à la règle : elle devient plus vieille et plus urbaine, comme le reste du monde. À ceci près que sa population stagne, voire régresse dans certains pays. Un pâle constat présenté par l’ensemble des démographes rassemblés cette semaine dans la capitale tourangelle. Dès lors, les scientifiques osent la question, posée jeudi en clôture d’une journée entière consacrée au continent : « Faut-il s’inquiéter pour l’avenir de la population de l’Europe ? » Non, répond Eva Bernhart, professeur à l’université de Stockholm. Pour la chercheuse suédoise, une « révolution des genres » menée à son terme concourrait à régler le problème. En réorganisant le monde du travail, les femmes pourraient rester actives et enfanter, tandis que les hommes participeraient davantage au projet parental. « Les pays où les femmes et les hommes travaillent ont une meilleure natalité que dans les pays où un seul des deux est actif », confirmait, plus tôt dans la journée, Constantinos Fokatis, de la Direction de l’emploi, des affaires sociales et de l’égalité des chances de la Commission européenne. De plus, « les individus devront travailler sur une plus longue période », propose Eva Bernhart, sans convaincre tout le monde. Jérôme Vignon, directeur de la protection sociale et de l’intégration sociale à la Commission européenne, penche, lui, pour le oui. Habile en langage technocratique, mais peu prolixe en analyse démographique, le fonctionnaire s’inquiète pour l’augmentation du taux de dépendance des personnes âgées (de 22 % à 41 % en 2030). Et propose une refonte des systèmes de retraite, du type de celles à laquelle les Français goûtent depuis peu. Bref, l’Europe se fait vieille et les démographes s’interrogent. De fait, la natalité est en panne, loin des 2,1 enfants par femme nécessaires au renouvellement de génération. Les situations diffèrent toutefois d’un bout à l’autre du continent. Et l’Union, bien qu’elle ait inscrit le problème au nombre des objectifs de l’agenda de Lisbonne, en 2000, peine à mener une politique d’aide à la natalité. « Partout, les frontières de la famille sont devenues plus poreuses et les systèmes juridiques se caractérisent plus par leur diversité que par leur uniformité », regrette Julien Damon, de la Caisse nationale d’allocations familiales. Quand le Danemark dépense 3,8 % de son PIB à la famille et aux enfants, l’Espagne n’y consacre que 0,5 %. « Une politique est difficile à mettre en place à cause des modèles très différents », confirme Constantinos Fokatis, de la Commission européenne. Autre changement latent et profond de la démographie européenne : les villes s’étendent. « On pourrait penser que l’urbanisme arrive à son terme, explique Denise Pumain, de l’Institut universitaire de France. En fait, ça bouge beaucoup. On constate un étalement urbain, avec une dédensification des centres- villes ». La surface bâtie a ainsi fait un bond de 30 % ces deux dernières décennies. Mouvante, l’urbanisation est souvent source d’inégalités. La ville, « proximité organisée », tend vers « l’inégalité organisée », craignent certains chercheurs. Troisième thématique de poids : l’immigration. « Le problème de fécondité pourrait être contenu par l’immigration », avance Eva Bernhardt. « Sans immigration internationale, certains pays européens connaîtraient depuis déjà quelques années une diminution substantielle du volume de leur population », reconnaît Serge Feld, de l’université de Liège, en Belgique. Il n’est pas question, cependant, de compter sur l’immigration pour résoudre le vieillissement européen, ajoute le chercheur. Les flux de migration sont loin des déferlantes cauchemardées, poussant l’Union à fermer ses frontières. « Les politiques publiques sont en décalage avec les flux du Maghreb, qui tend à devenir un interface entre l’Europe et l’Afrique », critique Mohamed Charef, de l’observatoire régional des migrations espaces et sociétés. Et d’ajouter : « Si les richesses ne vont pas aux pauvres, les pauvres iront vers les richesses. »
L’Europe ne déroge pas à la règle : elle devient plus vieille et plus urbaine, comme le reste du monde. À ceci près que sa population stagne, voire régresse dans certains pays. Un pâle constat présenté par l’ensemble des démographes rassemblés cette semaine dans la capitale tourangelle. Dès lors, les scientifiques osent la question, posée jeudi en clôture d’une journée entière consacrée au continent : « Faut-il s’inquiéter pour l’avenir de la population de l’Europe ? » Non, répond Eva Bernhart, professeur à l’université de Stockholm. Pour la chercheuse suédoise, une « révolution des genres » menée à son terme concourrait à régler le problème. En réorganisant le monde du travail, les femmes pourraient rester actives et enfanter, tandis que les hommes participeraient davantage au projet parental. « Les pays où les femmes et les hommes travaillent ont une meilleure natalité que dans les pays où un seul des deux est actif », confirmait, plus tôt dans la journée, Constantinos Fokatis, de la Direction de l’emploi, des affaires sociales et de l’égalité des chances de la Commission européenne. De plus, « les individus devront travailler sur une plus longue période », propose Eva Bernhart, sans convaincre tout le monde. Jérôme Vignon, directeur de la protection sociale et de l’intégration sociale à la Commission européenne, penche, lui, pour le oui. Habile en langage technocratique, mais peu prolixe en analyse démographique, le fonctionnaire s’inquiète pour l’augmentation du taux de dépendance des personnes âgées (de 22 % à 41 % en 2030). Et propose une refonte des systèmes de retraite, du type de celles à laquelle les Français goûtent depuis peu. Bref, l’Europe se fait vieille et les démographes s’interrogent. De fait, la natalité est en panne, loin des 2,1 enfants par femme nécessaires au renouvellement de génération. Les situations diffèrent toutefois d’un bout à l’autre du continent. Et l’Union, bien qu’elle ait inscrit le problème au nombre des objectifs de l’agenda de Lisbonne, en 2000, peine à mener une politique d’aide à la natalité. « Partout, les frontières de la famille sont devenues plus poreuses et les systèmes juridiques se caractérisent plus par leur diversité que par leur uniformité », regrette Julien Damon, de la Caisse nationale d’allocations familiales. Quand le Danemark dépense 3,8 % de son PIB à la famille et aux enfants, l’Espagne n’y consacre que 0,5 %. « Une politique est difficile à mettre en place à cause des modèles très différents », confirme Constantinos Fokatis, de la Commission européenne. Autre changement latent et profond de la démographie européenne : les villes s’étendent. « On pourrait penser que l’urbanisme arrive à son terme, explique Denise Pumain, de l’Institut universitaire de France. En fait, ça bouge beaucoup. On constate un étalement urbain, avec une dédensification des centres- villes ». La surface bâtie a ainsi fait un bond de 30 % ces deux dernières décennies. Mouvante, l’urbanisation est souvent source d’inégalités. La ville, « proximité organisée », tend vers « l’inégalité organisée », craignent certains chercheurs. Troisième thématique de poids : l’immigration. « Le problème de fécondité pourrait être contenu par l’immigration », avance Eva Bernhardt. « Sans immigration internationale, certains pays européens connaîtraient depuis déjà quelques années une diminution substantielle du volume de leur population », reconnaît Serge Feld, de l’université de Liège, en Belgique. Il n’est pas question, cependant, de compter sur l’immigration pour résoudre le vieillissement européen, ajoute le chercheur. Les flux de migration sont loin des déferlantes cauchemardées, poussant l’Union à fermer ses frontières. « Les politiques publiques sont en décalage avec les flux du Maghreb, qui tend à devenir un interface entre l’Europe et l’Afrique », critique Mohamed Charef, de l’observatoire régional des migrations espaces et sociétés. Et d’ajouter : « Si les richesses ne vont pas aux pauvres, les pauvres iront vers les richesses. »